Sur le chat interne, un de nos chefs a demandé ce qu’on avait appris du premier confinement, ou qu’on ferait autrement.
Certaines pensées étaient en gestation depuis un moment, mais l’obligation pour tout le monde de ne pas se voir m’a fait avancer sur le chemin. Je me suis rendu compte comme jamais avant que pour certaines personnes l’écrit et la distance sont des freins à l’expression et à la compréhension, personnes pour qui le moyen de communication « naturel » est plutôt oral.
En résumé donc, j’ai appris :
- À beaucoup moins m’agacer de ce qui ne va pas (ce qui n’est pas fait aujourd’hui ou pas idéalement, tant pis). C’est un apprentissage de la patience, au fond.
- À parler plus souvent aux gens. J’ai toujours eu mon logiciel de chat ouvert et je suis la plupart du temps à disposition des collègues, mais il y avait aussi des occasions de se parler de vive voix, occasions qui ne sont plus aussi spontanées avec la distance ; elles ont été remplacées par davantage de temps au téléphone.
- À planifier mes journées en conséquence de ce besoin de parler. Le temps « social » a son importance, donc il faut s’attendre à ce que 50 % de la conversation soit de la fonction phatique et pas de l’efficacité « productive » [1].
- À appliquer le « Principe de Postel » : « Soyez tolérant dans ce que vous acceptez, et pointilleux dans ce que vous envoyez ». C’est une règle employée par les gens du W3C depuis des années pour communiquer. Elle est très pratique dans un environnement tout-distant et composé de gens de cultures très différentes.
Le Principe de Postel, c’est quoi ? C’est une théorie qui vient de l’informatique et qui a à voir avec la permissivité du format des données dans TCP/IP, c’est dire comme on s’amuse quand on est un geek. Cette approche s’applique en fait très bien aux relations humaines. Elle permet en particulier de s’interdire de penser qu’un mail qui paraît mal formulé l’a été sciemment, ou que les gens sont « méchants » alors qu’il peut juste s’agir d’une maladresse ou d’un malentendu.
Beaucoup de tolérance peut en ressortir, moins d’agacements du côté du récepteur, et moins d’ambiguïté dans ce qu’on envoie.
Elle nous force à donner à nos correspondants le bénéfice du doute permanent, en somme, et c’est un bon principe.