Amusant comme quelques lectures se superposent parfois.
Parce que “disponible en librairies”, c’est gentil, mais je ne suis pas chez moi, là, je suis à l’étranger, et même si j’étais chez moi, je fais venir les livres à moi en 2012, je ne prends pas 1h pour aller voir s’ils sont dispos quelque part en ville.
(C’est moi qui souligne.) [1]
Parallèlement je lis ces jours-ci au moment du coucher Le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates de Mary Ann Shaffer et Annie Barrows (micro-phénomène littéraire d’une des précédentes rentrées) [2], et j’y note :
J’adore faire les librairies et rencontrer les libraires. C’est vraiment une espèce à part. Aucun être doué de raison ne deviendrait vendeur en librairie pour l’argent, et aucun commerçant doué de raison ne voudrait en posséder une, la marge de profit est trop faible. Il ne reste donc plus que l’amour des lecteurs et de la lecture pour les y pousser. Et l’idée d’avoir la primeur des nouveaux livres.
[…]
Je trouvais incroyable à l’époque – et encore aujourd’hui – qu’une si grande partie de la clientèle qui traîne dans les librairies ne sache pas vraiment ce qu’elle cherche, mais vienne juste jeter un œil aux étagères avec l’espoir de tomber sur un livre qui répondra à son attente.
J’ai l’impression très nette qu’on ne parle pas de la même chose dans ces deux citations, et que les mots de Stephanie dépassent en partie sa pensée : on ne va pas chercher la même chose entre une commande « utilitaire » (là, maintenant, tout de suite, je veux cet essai) et l’achat-plaisir, le plus fréquent dans mon cas.
Il y a quelques jours j’étais au plein centre de Nevers, un sac en papier à la main renfermant le nouveau parfum que je venais d’acheter (ça ne s’invente pas, vous allez voir). J’arrive devant la vieille halle (je crois ?) dont le premier étage a été reconverti en librairie grande-surface-grande-enseigne. Je m’apprête à m’y engager et non, la voiture est déjà pleine, vacances obligent, on ne va pas y rajouter encore des livres ou (horreur) des DVD.
Au détour de la rue suivante, je tombe pourtant sur la librairie Le Cyprès, qui se professe sur sa devanture « librairie curieuse ». Ah ça, il faut que j’entre ! Je prétexte auprès de ma conscience que j’y trouverai du Jean Echenoz, et je franchis la porte gaillardement.
Le nez au vent je m’empare de Cherokee à défaut de trouver Courir qui ne perd rien pour attendre [3], et je me dis que tant qu’à être là, les étagères sont sans doute assez achalandées pour enfin trouver L’amant de Marguerite Duras, que je ne vois jamais dans les supermarchés de la culture. Bingo !
Plaisir sans cesse renouvelé, sentiment en passant d’aider à faire vivre un passionné plutôt qu’une anonyme chaîne de magasins, fussent-ils en ligne (et que le web, tout de même, c’est mon gagne-pain).
Et quel régal de sourire au libraire qui pose son livre pour me servir, dans une bête ivresse telle que nous avons dû revenir : le sachet de la parfumerie m’était sorti de la tête et attendait sur le comptoir.
Ça n’a pas de prix, ce plaisir, et jamais je n’ai l’impression d’y avoir perdu une heure ; au contraire j’y ai gagné ; au point même d’en oublier tout le reste.
PS : sans vous commander, en ce moment il faut lire le blog d’Emmanuel qui est en verve.