Le passé est une trace qu’on garde comme un substrat, qui sert de base à ce que nous sommes. Si je n’avais pas eu telle chance, subi tel avatar, je ne serais pas qui je suis.
Un des moyens de mesurer le chemin parcouru, autant que de savourer les bonnes choses, c’est la photographie. Bien que passé comme 99 % des gens au numérique, j’avais pris l’habitude de tirer un album ou deux par an, dans mon ancienne vie. Je n’ai qu’une confiance toute relative dans les supports électronico-magnétiques, c’est comme ça, bon sens paysan ou truc de vieux con, choisis.
Or, lors du passage de vie à trépas de ma vie de parents-qui-habitent-ensemble l’année dernière, j’ai tout rejeté. Tout laissé posé là dans leur étagère, tous ces livres pleins de souvenirs que dépité je ne reconnaissais plus, pleins autant de souvenirs vécus que de façades et de mensonges. Il fallait jeter du lest de peur de plonger encore davantage.
Tous les albums, même les derniers argentiques. Le voyage à Pékin, les enfants tout petits, les vacances ici et là, les étés insouciants.
Maintenant, je regrette quelques clichés, en particulier sur l’argentique. Parce qu’après tout, quant au numérique, j’ai jeté des choses mais j’ai gardé l’essentiel (au sens originel « d’essence »), et peut-être qu’un jour je reprendrai l’historiographie, je filtrerai et je tirerai à nouveau des albums de ces années passées.
En attendant, c’était une façon radicale de faire table rase, qui ne me ressemble pas tant que ça. Avec le recul, une façon de laisser la place libre au reste de la vie, qui est déjà une grande chose en lui tout seul. Du tao qui ne le sait pas, laisser passer le courant et tout ça.
Continuer à me gorger de belles choses, en les vivant, en les photographiant, et le reste, on verra plus tard.