Je connaissais déjà bouletcorp parce que de temps en temps mes copains oisifs [1] m’envoient l’adresse d’une page que tu-vas-voir-il-est-marrant-Boulet.
Oh, je pourrais bien les envoyer balader, moi qui suis occupé comme les dérangements et important comme une ordonnance quand tu as une grippe, mais je suis trop bon. À cela deux raisons : 1. je n’aime pas décevoir mes copains et 2. il n’en faut pas beaucoup pour me détourner de mes nobles tâches.
Et donc voilà, périodiquement je lis Boulet. Ouais, c’est marrant. Ouais, j’ai lu, ouais, c’est marrant. Bon, je retourne travailler [2].
L’autre jour je me balade dans ma librairie favorite, et voilà-t-il pas que dans l’excellente collection Shampooing je vois Notes dudit Boulet.
La collection Shampooing, pour ceux qui ne connaissent pas, est une collection de bandes dessinées épaisses [3], passionnantes, ce que Xavier appelle « les indés-like », mais comme je ne suis pas homme à cracher dans la soupe, peu m’importe que ce soit un petit éditeur ou une grosse maison qui publie des indés-like, l’important c’est de lire de la qualité. Non ? Bref, la spécialité de Shampooing est de fréquemment publier sous forme de recueils des bandes dessinées tirées de blogs BD.
Qu’il me soit permis ici de citer Jean-Noël :
Le “blog bd” constitue un domaine capital dans l’économie de la bande dessinée et, à en juger par l’émergence des nouveaux auteurs, il semble que ce soit presque devenu un passage obligé dans une carrière, plus encore que le fanzine papier à sa grande époque.
Où en étais-je ?
Ah oui, collection Shampooing, blogs BD, patati-patata. Bon donc. On a déjà investi dans la moitié du catalogue de Shampooing, à la maison, alors on ne va pas s’arrêter là. J’ai encore, malgré le relatif aspect non-écologique de la chose, un amour fou pour le papier. Je trouve que la bande dessinée, ça reste mieux en papier. Vieux rétrograde ?
Donc je ne résiste pas, et ça fait deux jours que je me balade avec l’album d’une pièce à l’autre de la maison, savourant page après page (je vous avais bien dit qu’on en a pour son argent). Je lis toutes les planches que je n’ai jamais lues, et c’est jouissif : déconnant, régressif, virtuose, plein de couleurs, maîtrisé en tout alors qu’on a l’impression (confirmée par l’auteur) que tout est spontané, sans croquis préparatoires. Et puis varié, très varié, dans le dessin. Voilà un auteur riche, ma bonne dame.
Je viens d’aller revoir les vieilles planches republiées dans le livre, et sur le blog il y en a encore plus : une aquarelle par-ci, un guest star par-là. Pour autant, un album, c’est toujours le plaisir d’une concentration de lecture, d’une autonomie technique (va lire sur ton ordinateur, debout en attendant le train ou assis sur les chiottes, toi) [4].
Juste un reproche : le format. Les pages sont un poil trop compactes pour mes vieux yeux. Dans cette taille-là on serait plutôt dans le gaufrier de 6 cases (en exagérant un peu) ; là c’est souvent très dense, plein de texte et avec un trait un peu épais qui, bien que très adapté à l’écran, se révèle laborieux sur un si petit format. C’est dommage, ça enlève un tout petit peu du plaisir.
En revanche, il intercale des pages de commentaires, où il met en relief les pages par un regard avec du recul sur son travail de l’époque. C’est bien vu, et l’ensemble gagne en cohérence.
Bref, merci à Pierre et à Fabien de m’avoir harcelé. Tout le plaisir est pour moi. Et merci à Boulet : c’est canon.