Netscape tout nu !

Ça y est, c’est officiel, Netscape s’ouvre au bidouillage forcené. Pour ma part, je me demande bien ce que Netscape a à y gagner...

A partir du 31 mars 1998, les codes-sources du programme Netscape Navigator (ou Communicator, enfin bref le dernier nom branché à la mode de chez eux) seront téléchargeables, et modifiables par les développeurs.

Concrètement, ça signifie que dans le monde entier, les petits génies vont pouvoir s’en donner à coeur joie, en corrigeant les bugs qui les ennuyaient jusque-là dans cette application.

Extrapolons : va-t-il exister autant de versions du navigateur que de bidouilleurs ? Non, car Netscape a pensé à tout (merci Netscape, s’écrie à l’unisson le choeur romain). Ils ont créé un site, Mozilla.org, afin que les gentils programmeurs leur fassent remonter toutes les belles améliorations qu’ils ont concoctées.

A part le problème toujours un peu délicat de faire des listes de clients, pratique courante sur le Net (voir tous les formulaires qu’on nous demande de remplir de droite et de gauche), ce site va surtout permettre, dans l’idéal de Netscape, de redonner un peu de souffle au web contributif. D’aucuns (dont Webmonkey, si je ne m’abuse) s’en félicitent : enfin, on va revenir à une époque bénie de partage des données, comme ce fut le cas pour Linux (le seul environnement entièrement modifiable et gratuit, me suis-je laissé dire). Emettons quelques réserves.

Pour ma part, je me demande bien ce que Netscape a à y gagner... Car enfin, mis à part le fait que des gentils programmeurs dans le monde entier vont débugger l’application gratuitement, et que donc le produit sera de meilleure qualité, et que Netscape, comme tout le monde, souhaite évidemment proposer le meilleur produit possible au plus bas prix possible, nous touchons le noeud du problème : c’est tout de même un logiciel gratuit. Vont-ils donc un jour le refaire payer aux utilisateurs ? Certainement pas, sans quoi tous les gentils programmeurs qui auront contribué à l’amélioration du produit viendront réclamer des royalties. Ou alors, on peut imaginer que Netscape se servirait de ce produit comme "produit d’appel", pour sourire d’un air enjôleur aux administrateurs réseaux afin de leur proposer des systèmes Netscape pour faire tourner leurs bécanes. C’est sans doute déjà plus proche de la réalité, mais on objectera aussitôt que, puisque le monde entier aura coopéré à l’amélioration du produit, ledit produit ne sera plus une preuve intrinsèque de la qualité de leurs services, puisqu’il sera alors composé en partie de ce qui émane effectivement du fabricant, et en partie des améliorations apportées par les gentils programmeurs.

Je vous avoue très sincèrement que je ne comprends pas ce qu’ils ont à y gagner, à part en faisant de nous, éventuellement, des "utilisateurs captifs" (la méthode éprouvée par ailleurs, où en forçant les utilisateurs à mettre un bout de doigt dans l’engrenage d’un fournisseur d’environnement, par exemple, on finit par ne plus utiliser pour toutes les grosses applications que celles qui sont le mieux intégrées à cet environnement). Qui dit "utilisateurs captifs" dit rentrées d’argent, par la voie des contrats que pourra signer Netscape avec les fournisseurs de contenu afin de les faire figurer dans la liste des sites "netcastés" (l’équivalent sur Internet Explorer existe, ce sont les "channels").

Mais le gain me semble disproportionné par rapport à l’effort entrepris pour rendre publique la source et centraliser par la suite ses améliorations. Par contre, je comprends ce que nous, utilisateurs, allons y gagner : la puissance de navigation dégagée des bugs pourrait bien faire de ce navigateur le meilleur du marché...

Post-Scriptum

Je vais finir par supprimer cet article, c’est presque indécent de le laisser en place, maintenant que Netscape n’est plus...

Ou alors pour l’histoire...

Commentaires

  • Je découvre ce billet et son post scriptum dans lequel vous dites que Nestcape n’est plus. Je suis abasourdi !

    Répondre à Netscape fanboy

  • Stéphane (22 mars 2018)

    Netscape fanboy : Ils vont rebondir, n’en doutons point.

    Répondre à Stéphane

  • Tristan (18 janvier 2019)

    Il existe une expression américaine pour désigner la capacité de rebondir de Netscape : le "dead cat bounce". Un chat mort, ça peut rebondir, il suffit de le laisser tomber de suffisamment haut.

    Sinon, je suis estomaqué de voir que tu as encore des billets de cette époque !

    — Tristan

    Répondre à Tristan

  • Stéphane (21 janvier 2019)

    Tristan : Oui oui oui 🙂 ça fait un peu partie du « contrat » des blogs, je trouve, la pérennité des contenus, même s’ils ne sont plus complètement, voire plus du tout, pertinents. Ça contribue un peu, j’espère, à l’histoire pour les archéologues du web.

    Répondre à Stéphane

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