D’un côté il y a les inquiétudes, bien légitimes. La bêtise, aussi, les amalgames faciles, les raccourcis rapides, la détestation plutôt que la compassion (pourquoi, encore et toujours, entend-on parler du Front National ?).
De l’autre il y a une réalité violente qui tue ici en France 17 personnes, des centaines au Nigéria.
Pour rassurer les masses, on ne peut pas leur dire que cette situation est aussi le résultat de toute la politique post-coloniale depuis la seconde guerre mondiale. Pas seulement, me direz-vous, mais ne l’oublions pas.
On ne peut pas non plus leur dire la misère raciste qui fait le quotidien de nombreux français. Parce que la masse continue à avoir peur de croire que comprendre, c’est excuser. Non, comprendre, c’est chercher des raisons, et de là vouloir chercher des solutions.
Pour jouer un peu à inquiéter les masses (ça fait de l’audience, ça, coco), on interviewe un musulman à la radio qui dit qu’ils l’ont cherché. Tandis que des millions d’autres partagent la peine des uns et des autres, mais sont moins média-géniques.
Pour rassurer les masses, on va vite-vite-vite restreindre la liberté de tous les citoyens, les espionner un petit peu mieux si on peu.
Quand même, hors des sentiers alternatifs où tout le monde râle, à tel point que nombre de gens pensent qu’on n’a rien à y lire, Le Monde fait plus fièrement son travail ces derniers jours et titre salutairement que la radicalisation des terroristes n’a pas eu lieu sur le Web.
Pour les plus malcomprenants d’entre nous : ça veut dire que ce n’est pas en resserrant les boulons d’internet qu’on empêchera la violence.
T’as compris, là ?
Ça faisait longtemps, note bien. Quand j’ai commencé à fréquenter le web, tout le monde me demandait si je n’y croisais pas trop de pédophiles-communistes-anarchistes. Un vil repère de pervers que cet internet. Si, si, rappelez-vous, c’était il y a presque vingt ans. Je vous jure qu’on me posait la question tout le temps. Maintenant vous serez bien braves de me rappeler où vous avez fait une partie non négligeable de vos achats de Noël, où vous envoyez vos vœux, où vous gardez le contact (ou le retrouvez), où vous discutez de choses privées en ayant confiance (peut-être à tort) dans le réseau.
Un jour on discutera du syndrome du pansement sur la jambe de bois. Sortez en rang.