Souvent j’entends, plus ou moins par accident, sur les radios pour les plus de 40 ans, où la nostalgie s’empare maintenant de ma jeunesse alors que jusqu’à ces dernières années elle me parlait de celle de mes parents, et on vieillit ma bonne dame, mais je digresse et où est le début de ma phrase déjà ?
Souvent on me propose de « découvrir le nouvel album de », et ensuite quelques couplets d’une ballade poussive par un vieux chanteur (ou une vieille chanteuse, ne soyons pas sexiste) presque aphone, mélodie inexistante et maladroite dont on ne voudrait pas si c’était un jeune-qui-débute. Souvent aussi, le vieux s’est acoquiné avec une star montante, en espérant raccrocher les wagons et ne pas être ignoré des générations montantes. Mais n’est pas Dalida qui veut [1].
Pourquoi je pense à ça à l’heure du café du matin ? À cause du dernier morceau de Bowie qui correspond assez bien au portrait-robot [2]. C’est insipide, et ça fait un peu mal venant du mec qui a incarné le glam-rock, qui a popularisé la jungle (non pas que je sois fan, mais quand même, c’était ambitieux, Earthling). Même la voix n’est plus vraiment là, on croirait qu’elle est occupée à autre chose alors que bon sang [3], Bowie avait une voix qui donnait des frissons, non ?
On notera au passage que certains y croient encore, comme le Guardian
It’s a beautiful, elegiac ballad, Bowie’s voice sounds gorgeously fragile – not the fragility of someone nearing 70 who’s lost their vocal power to the ravages of age, but the fragility of someone who wants to communicate an aching wistfulness.
Il faut comparer ce qui est comparable et écouter sa reprise du Port d’Amsterdam : quand même, hein, c’est pas pareil, hein, quand même ?
Et soudain, indigné dans mon canapé, je pense que nous, mortels insignifiants, nous avons le droit de finir notre carrière benoîtement, attendre la retraite en disant aux petits jeunes qui y croient « boh, tu sais, moi, à mon âge. » Notez que je n’en suis pas là, mais j’ai vu autour de moi, et on verra quand j’aurai plus de 60 ans. Nous, donc, avons le droit, alors que nous demandons aux artistes de rester des êtres d’exception jusqu’à la fin. Et même que par moments ça fait de la peine.
Regardez Aznavour, tiens. Il me fait penser à mon grand-père, et même s’il n’était pas l’immense artiste qu’on connaît, je l’aimerais rien que pour ça. Mais quand il chante j’ai envie de pleurer, un peu.
Aurais-je le courage d’arrêter, à leur place ? Est-ce que c’est un problème d’addiction aux feux de la rampe ?
C’est peut-être le prix qu’ils doivent payer pour avoir été un jour sur le devant de la scène, je ne sais pas.