Hier, nous avons enterré le père de Stéphane (un de mes meilleurs amis). Il avait à peu près cinquante ans, vous vous rendez compte ? On ne devrait pas mourir si jeune.
Il y a trois jours, ma mère nous a appelés pour nous prévenir. Au début, j’entendais ce qu’elle disait, sans comprendre vraiment. Puis la nouvelle s’est frayé un chemin dans mon esprit, doucement. C’est si incroyable. Cet homme était en bonne santé, bon sang. Enfin, on le pensait. Il avait eu deux ou trois alertes cardiaques en juin —et il n’y avait même pas prêté attention. Ça lui semblait sans importance.
Et maintenant, je voyais son fils pleurer, et j’étais moi-même sur le point de l’imiter. J’imagine que tout le monde a déjà vu un pote pleurer, je n’ai pas besoin de le décrire. En tout cas, c’est dur. J’aimais beaucoup son père. J’avais été un de ses élèves (il était instituteur) quand j’étais môme. Et depuis ce temps-là, Stef et moi jouions dans sa rue ou dans la mienne tous les jours. J’ai été chez lui si souvent, j’ai vu son père tant de fois, que je ne peux même pas les compter !
Cet homme était amical, ouvert aux autres ; il avait quelques tics qui en faisaient un peu une célébrité dans notre petite ville, comme d’aller à l’école sur son vélo grinçant, une main sur le guidon et l’autre dans sa veste, sifflant ou fumant dans les matins froids d’hiver.
Et il se retrouvait là, dans sa boîte en bois. Et nous étions là, à écouter ce curé presque mystique nous parler encore et encore du "mystère de la vie".
Mince. Je ne peux même pas vous montrer de photo de lui, je n’en ai pas. J’imagine que vous allez devoir me croire sur parole si je vous dis qu’il était le plus gentil des hommes.
Comment peut-on jamais s’habituer à la mort ?