Charlie Hebdo

Je n’ai rien à dire mais je vais le dire quand même, parce que j’ai le droit.

Ce matin, en allant au travail, j’écrivais un petit article gentillet et niais dont j’ai l’habitude, sans talent ni prétention.

Je parlais de Encore des nouilles, de Pierre Desproges (chez Les Échappés), recueil illustré par plein de gens dont Cabu, Charb, Tignous, Wolinski.

J’hésitais à laisser une critique, que les dessins étaient vulgaires et n’apportaient rien.

Et puis je suis allé travailler, me promettant de relire ce soir. On verrait plus tard.

Annonce ébahie de mon pote Alexandre ce midi : « Je n’ai pas tout compris, j’entends parler de fusillade près de Charlie Hebdo. »

Et puis lors de notre réunion de l’après-midi, d’un œil on lit les nouvelles au fur et à mesure qu’elles apparaissent.

Des fous furieux ont tué des dessinateurs.

Qu’est-ce que tu veux comprendre à ça ?

Je n’ai jamais acheté Charlie Hebdo, parce que je n’aime pas trop leur « humour bête et méchant, » dans le sillage de Hara-Kiri. Ça ne me faisait pas rire, voilà. Je n’ai même pas aimé leur humour avec les caricatures de Mahomet, je comprends et j’estime que les recteurs de mosquées aient porté plainte contre eux. C’est le jeu d’une démocratie qui fonctionne, d’un endroit où on a le droit de s’exprimer, et aussi de réfuter, de critiquer, de débattre, de détester aussi.

Pour moi, Charlie, c’est surtout un type un peu rondouillard, un genre de clodo qui campait devant la bulle des fanzines à Angoulême quand j’y allais user mes chaussures il y a vingt ans. Un mec sympa qui haranguait les gens en vendant à la criée des Charlie, avec qui on papotait dans le froid, qui nous disait « Allez les gamins, achetez Charlie, défendez la liberté ! ».

Je n’ai jamais acheté un Charlie mais j’ai causé avec ce bonhomme que je ne connais pas, et toujours rigolard et jovial. Je n’ai jamais su qui il était, ni même s’il était officiellement mandaté pour faire le vendeur.

Je n’aime pas les panégyriques que j’entends dans les médias, parce que plein de gens n’en disaient rien de bon, voire méprisaient Charlie, journal pas noble qui pue l’encre.

J’ai décidé, par respect pour ces gens qui sont morts pour avoir le droit de se foutre de ta gueule, de ne pas supprimer ma mauvaise ligne.

« On peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui. » — Pierre Desproges

PS : Cabu qui meurt, c’est le tonton lointain qui fait des dessins le mercredi chez tata Dorothée. Pour ma génération, c’est le mec génial et cool qui savait tout dessiner à Marabout’ficelle avec Willy Leymergie.

PPS : C’est un peu en bazar, mais vous me pardonnerez, hein ?

PPPS : Je n’ai même pas dit que mes pensées vont aux familles, des dessinateurs, des journalistes, des gens autour, et des policiers héroïques (le mec avec son petit pétard qui s’oppose à des kalashnikov).

Commentaires

  • taline (26 janvier 2015)

    Que cela fait du bien de lire des personnes dire intelligemment ce que je ne savais pas exprimer y compris les ps, pps et ppps. Ce charlieorthodoxie m’épuise.

    Répondre à taline

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