Addictions

J’ai toujours été d’un naturel à être accro. Au fil du temps, accro au sucre, au chocolat, aux bandes dessinées, aux séries télé, au web, et maintenant au petit verre du soir et aux réseaux sociaux. Toujours sur le fil entre « la passion » qui permettrait presque de cacher un déséquilibre dans le trop et, justement, ce déséquilibre.

Il y a quelques années, je buvais un soda par jour au boulot, en plus des cappuccinos dégueu et trop sucrés, et des bonbons du distributeur. (J’ai arrêté presque tout ça depuis.)

Je m’étais même désabonné de Netflix qui me faisait perdre le sommeil, et puis évidemment avec les confinements, j’ai cédé.

C’est à peu près comme tout le monde, vous me direz. Certes, répondrai-je, mais ces deux dernières années ont amplifié la chose.

Surtout, insidieusement, je me suis rendu compte il y a peu, après l’avoir constaté chez un ou deux camarades, que je buvais de l’alcool de plus en plus fréquemment, peut-être jusqu’à 4 fois par semaine. Le covid a eu un effet sournois sur tout le monde, entre les confinements qui sont tout le contraire du naturel, la disparition de notre habitude à nous projet dans l’avenir… nous sommes devenus fatigués chroniques, indécis permanents.

Oh, ce n’étaient que des petites quantités, hein : une bière un soir sur deux, si on compte. C’est même moins que « l’alcoolisme passif » [1] de nos parents, qui avaient du vin à table à tous les repas et buvaient de la bière comme on boit de l’eau. Une fois ou deux ces derniers mois, me retourner sur la semaine et voir que j’ai eu tous les jours une raison de me servir un verre — et que je l’ai fait.

Alors, à la suite des copains qui ont constaté la même chose chez eux, j’ai décidé depuis deux semaines de mettre des garde-fous. Je ne trinque donc plus que le week-end, et encore, très peu (je n’ai finalement que peu le goût de l’alcool). Je me limite à un carré de chocolat deci-delà, contre une tablette entière que je finissais sitôt ouverte précédemment. J’écoute aussi mon corps me dire qu’il est 22 heures et que Netflix attendra.

Un autre de mes camarades pointe vers un documentaire sur youtube que je n’ai pas encore vu, sur l’addiction. Je l’ajoute à ma liste de choses à regarder.

Mention spéciale pour les réseaux sociaux aussi, que j’ai juste effleurés au début de cet article, qui sont autant le café du commerce où je passe mes soirées à rire avec les copains que le vecteur de toute l’information triste et anxiogène qui ne fait qu’affluer sans répit. Là encore, grosse addiction, sur laquelle j’ai mis un gros frein.

On verra comment tout ça avance. J’ai mal partout, j’ai pas l’moral, j’suis mou-mou-mou comme une pub Vittel avant le passage de Gotainer.

J’aspire au calme. Et au bruit de la mer dans un coin de l’oreille, une des rares thérapies zen efficaces pour moi — attendons encore quelques jours pour en reprendre une dose.

Par contre je vais garder la bande dessinée, il ne faut pas exagérer quand même.

PS : je découvre que j’avais écrit un début de brouillon en janvier 2020 (avant les confinements, pourtant), où j’avais noté cette citation :

Ah et un dernier mot : je [n’ai] jamais vécu le fait d’arrêter de boire comme un manque, je bosse mieux, je dors mieux, je vis mieux, je dépense moins, avec moi et les autres. Et surtout comme j’ai un esprit addictif, j’ai reporté mon obsession de l’ivresse et des saveurs sur d’autres domaines, moins toxiques. On ne perd rien, en fait, et c’est peut-être un des trucs que peuvent enseigner les artistes que nous sommes : d’une apparente contrainte, d’une perte, nous tirons de la nouveauté et du sublime.

Notes

[1Faute d’un meilleur terme, et par comparaison avec le tabagisme passif : enfants, nous respirions quotidiennement des clopes que nous ne fumions pas.

Commentaires

  • fipaddict (25 octobre 2021)

    Encore une fois, cela résonne ici - dans ma tête.

    Merci d’avoir pris le temps (et le courage ?) de coucher cela par écrit et de le publier.

    Répondre à fipaddict

  • Franck (26 octobre 2021)

    Cette période inédite nous rend plus vulnérable à des addictions : il s’agit de savoir prendre le recul nécessaire pour s’en rendre compte, ce qui est loin d’être évident, et tenter autant que possible de corriger le tir. Ça résonne aussi, ici.
    Well done, mate.

    Répondre à Franck

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